vendredi 4 février 2011

MINI CHRONIQUE D'UN INSTITUTEUR EN ROUTE

« Ma mallette pédagogique à moi… »
Mini chronique d’un instituteur en route..

Je suis un de ces méconnus instituteurs qui font leur travail en remplaçant leurs collègues en congés divers sans, souvent, connaître le public qui nous attend quand retentit la sonnerie d’un téléphone matinal. C’est lui, ou plutôt la voix qui l’habite, qui nous envoie juste là, à côté ou au bout du département si la nécessité l’exige. Qui sont nos futures rencontres d’un jour ou de trois semaines ?
Ils peuvent quelques bambins de tous âges regroupés au chaud d’une classe unique, cachée dans la forêt de Grésigne.. Ou ce sera une cohorte de petits coqs, habillés de maillots de footballeurs dans un quartier coloré de Castres ou de Graulhet.. C’est souvent des pitchounes de classes maternelles, tellement occupés à démonter des rêves en construisant des châteaux en briques de plastique qu’ils ne se rendent compte de votre présence qu’au moment où, tombant la veste, vous invitez la marmaille au cérémonial de l’appel… Parfois ce sont quelques durs à cuire, faits de pâte à modeler, qui vous la jouent : « t’es qui toi ? », et que l’ombre d’un sourcil descendu renvoie à leurs chères études.. Il y a aussi les morveux, gouttes au nez, couches trop vite retirées, qui réclament leur mère, la mamie, Nicole, Patricia quand ils croisent votre regard… Pour tout ce petit monde – j’ai calculé, depuis neuf mois, j’en ai rencontré plus de mille cinq cents -, pour ce petit monde, écrivais-je il me faut me préparer différemment quand j’ai la chance de savoir qui je vais visiter..
Immanquablement, si je commence par la douche et le thé matinal, je prépare mon cartable. Il me faut ma trousse, mes trousses tant il est difficile parfois de trouver une paire de ciseaux, un rouleau d’adhésif, une loupe, un taille-crayon mis à l’abri dans un bureau fermé… Puis des carnets de dessins, il y a toujours une pose le midi et pas toujours un lieu accueillant.. un casse-croûte : les cantines dites « intégrées » sont toujours chères et surtout pas très bonnes : que ne fait-on pas manger à nos écoliers affamés ?
Quand je sais le niveau de la classe, je leste le sac du classeur bleu (les maternels) du classeur rouge (les primaires, CP, CE1, CE2) ou du vert (les CM). J’y adjoins quelques logiciels et DVD au contenu naturaliste, j’ai toujours dans la voiture un filet à papillons, un trouble-eau, quelques boîtes et un terrarium portatif.. Et là je me sens prêt à aller pourfendre l’ignorance et l’oisiveté..
Ah, oui j’oubliais ! Quand je fais mon sac, tous ces matins différents, il y a quelque chose que je n’ai pas à ajouter.. Quelques choses qui sont rangées dans le sac, nuits et jours : ce sont les CD de Marc Pinget… Car quelques soient les élèves devant lesquels je me présente, je passe toujours par la chanson ; j’arrive et je leur propose de chanter : tous les élèves aiment chanter..
Alors les classiques passés, je leur propose du « Pinget », et, à chaque fois cela marche : les goules assombries se mettent à briller, les yeux éteints à regarder la vie, les joyeux à fredonner, les durs à s’émouvoir…
Et maintenant après quelques années de « tournées », quand je reviens dans une école déjà précédemment visitée, je suis obligé de resservir les chansons proposées parfois trois ou quatre ans auparavant.. Et gare à moi, si j’oublie un CD, parfois piqué par mes enfants ou Martine, elle-même institutrice en maternelle, car il me faudra chanter sans le support du disque, et là…, et là… Je ne suis pas sûr d’être très bon à l’ouvrage…
Pascal Polisset, instituteur remplaçant dans le Tarn

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